Par Marilyne Bouix, œnologue
Cette petite bestiole invisible signifie la vie et la civilisation, sans elle, pas de pain, pas de vin. C’est la magicienne boulimique du microscope.
La levure, petit être vivant microscopique, est présente partout dans la nature ; dans les sols, sur les raisins, dans les chais. Elle est indispensable en agronomie, une vraie star ! Sans levure, pas de pain, pas de bière, pas de vin…
Celle qui nous intéresse au premier plan est du genre Saccharomyces. Mais il existe beaucoup d’autres genres de levures.
Pour le vin, elle intervient au tout début de son élaboration, au stade de jus de raisin. Son rôle est simple, transformer les sucres du raisin en alcool ; c’est la fermentation alcoolique. Pour bien la réussir, il faut prendre soin d’elle parce qu’elle est sensible ! Au fil des découvertes, l’homme s’est rendu compte qu’elle était multifonction, une véritable usine ! Deux autres de ses activités interviennent pour l’élaboration d’un bon vin:
Dans un premier temps, la levure permet de révéler les arômes du raisin. Elle rend les composés inodores présents dans les baies en molécules odorantes aux arômes de fruits et/ou d’épices qui reflètent la typicité du terroir ou du cépage. Ce qui explique qu’un vin sent la cerise, la framboise, la pêche, la banane, le poivre,
Il existe différentes souches Saccharomyces qui vont exprimer plus ou moins les composés aromatiques en fonction des cépages et des conditions de vinification.
D’autre part, elle synthétise différentes molécules qui donnent de la rondeur au vin, du gras. La majorité des vins étant secs, c’est-à-dire sans sucre, ces molécules sont intéressantes pour l’équilibre en bouche, la complexité.
Dans de bonnes conditions de vinification, notre levure du genre Saccharomyces prend le dessus sur les autres levures et nous donne du vin. Le vinificateur peut choisir de fermenter avec des levures indigènes, c’est-à-dire avec des levures naturellement présentes dans le milieu. Il peut aussi utiliser des levures sélectionnées pour leurs capacités à révéler les arômes par exemple. Ces levures industrielles sont en fait des levures indigènes qui proviennent des vignobles. Elles ont été isolées et sélectionnées dans un but précis.
Restent-elles dans le vin ensuite ?
Non, à la fin de la fermentation alcoolique, elles meurent, se dégradent et se déposent au fond de la cuve. Ce dépôt s’appelle la lie. Au bout d’un moment, il sera éliminé lors des transferts et des différentes opérations de préparation des vins pour la mise en bouteilles comme le collage et la filtration.